BEAUCARNE (Julos)

Ce conteur né, écologiste avant la lettre, doux utopiste, fondateur du “Front de libération des arbres fruitiers”, dont les textes distillent une poésie tendre, une sagesse malicieuse (De mémoire de Rose, Le petit royaume) ou une truculence toute wallonne sait aussi trouver les mots justes pour parler du Chili (Lettre à Kissinger, écrite sur la mort tragique de Victor Jara : “une rafale de mitraillette / abattit alors mon ami / celui qui a pointé son arme / s’appelait peut-être Kissinger ), ou se servir des mots des autres (Hugo, Nadaud, Verlaine) pour les intégrer dans son propre univers (Je ne songeais pas à Rose, Si la Garonne elle avait voulu, Mon rêve familier). Dans sa reprise de la chanson traditionnelle La p’tite Gayole, Beaucarne y a intégré le fameux Nous sommes 180 millions de francophones, dont l’énumération (un régal !) vaut largement toutes les professions de foi francophones entendues ici ou là.

Julos Beaucarne n’a cependant pas reçu dans l’hexagone l’accueil que méritait l’originalité de son talent. Claude Nougaro contribua au milieu des années soixante-dix a mieux faire connaître le chanteur belge en interprétant Lettre ouverte de Julos Beaucarne (reprise dans l’album “Femmes et famines” : un texte bouleversant sur la mort de l’épouse de Julos Beaucarne “assassinée par un homme devenu fou qui se clôt par “Je pense de toutes mes forces qu’il faut s’aimer à tort et à travers ).