CHARLEBOIS (Robert)

Il suffit parfois de traverser l’Atlantique. C’est ce qu’a fait à l’automne 1968 un chanteur (et compositeur) quebecois inconnu du nom de Robert Charlebois. Ses concerts à l’Olympia (avec le concours de la chanteuse Louise Forester) ne passent pas inaperçus. Parmi les titres remarqués (dont La Californie, La marche du Président), la chanson Lindberg attire plus encore l’attention. Sur un texte délirant de Claude Peloquin, bénificiant d’une interprétation folingue du couple Charlebois/Forestier (sans parler de l’accompagnement des musiciens du Nouveau jazz libre du Quebec !), Lindberg casse la baraque : cette cabane canadienne que l’on croyait pourtant solide, mais avec un tel vent de folie ! Le disque suivant (Les ailes d’un ange, Te v’la, Tout écartillé) apporte la confirmation du talent de Charlebois. La livraison qui suit, celle de 1970, représente un second temps fort dans la carrière du chanteur. Outre le celèbre Ordinaire (musicalement très réussi), l’ébouriffant Mon pays ce n’est pas un pays c’est un job permet de prendre connaissance d’un nouveau Quebec (du moins en chanson) : plus diversifié, plus urbain, davantage branché sur la culture made in USA. A condition de bien maîtriser son joual ! (texte de Rejean Ducharme) : “Ca arrive en manifacture / les deux yeux fermés ben durs / les culottes pas zipper, en retard / Ca dit que ça fait un flat / Ou que le char ne partait pas / Ca prend tiute pour entrer / Sa carte de punch dans slot de la clock .

Même s’il ne reste pas sur ces sommets, Robert Charlebois, tout au long des années soixante-dix, alterne non sans bonheur ballades (Le piano noir, Je reviendrai à Montréal, Cartier), rock déjantés (Le mur du son, Entre deux joints, The frog song) ou humoristiques (Tu mu chu, Manche de pelle) sur des textes de Ducharme, Sabourin, Thibon, Mouffe ou Charlebois. La carrière du chanteur québécois ne s’arrête pas au seuil des années quatre-vingt, mais Charlebois donne de ses nouvelles plus irrégulièrement. On remarque que ses nouveaux auteurs (Plamondon, son fils Jean) ne valent pas les anciens (toujours présents cependant). Le disque “Maudite tournée” (enregistré en public en 1995) prouve si besoin était que Robert Charlebois n’a rien perdu du coté de l’énergie ni son humour.