GUILBERT (Yvette)

Même si le répertoire qui fait la célébrité d’Yvette Guilbert a été principalement constitué pendant les dernières années du XIXe siècle, cette chanteuse appartient également au siècle suivant en raison de la longévité de sa carrière et des célèbres enregistrements qu’elle grava dans la cire durant les années trente. Le fiacre et Madame Arthur sortent du lot en apportant le témoignage de l’art subtil d’une diseuse. Yvette Guilbert avait su conquérir de nombreuses personnalités des arts et des lettres de “la belle époque” avant de séduire un certain Sigmund Freud (lequel accrochera dans son bureau le portrait de la chanteuse à coté de celui de Lou Andréa Salomé). Dans ce “premier répertoire” figurent, en plus du Fiacre, d’autres chansons du talentueux Xanrof, l’un des piliers du “Chat noir” : L’hôtel du N° 3, Les quatr’ z’étudiants, Elle était très bien. A la même époque Yvette Guilbert exhume et met en musique des poèmes de Paul de Kock qui paraissent avoir été écrits pour elle (Madame Arthur, bien sûr, mais aussi Quand on vous aim’ comme ça, J’m’embrouille).

On doit à cette chanteuse exceptionnelle, à la diction impeccable, l’invention de ce parlé / chanté qui, par delà les effets précieux, ironiques ou de distinction recherchés, permet à l’interprète de prendre de la distance vis à vis des genres grivois et réaliste (Partie carrée d’un coté : “De sorte que madame Bouton / Faisait avec monsieur Boudin / Juste c’que madame Boudin / Faisait avec monsieur Bouton “, La pierreuse de l’autre). Le physique singulier d’Yvette Guilbert (la “dame aux gants noirs, vêtue de satin vert”, immortalisée par le pinceau de Toulouse-Lautrec) participant de cet exercice de distanciation. La seconde partie de la carrière d’Yvette Guilbert est plus convenue, La chanteuse se consacre principalement à l’exploration du répertoire traditionnel de la chanson française, non sans réserver une large place à l’oeuvre de Bruant et à l’adaptation musicale de poèmes. Dans le premier cas de figure, son interprétation de Verligodon (chanson paysanne) relève du chef d’oeuvre.