JONAS (Jehan)

Jehan Jonas fait partie des “grands oubliés” de la chanson française du XXe siècle. Celui qui se décrit dans L’étiquette comme “Un chanteur très littéraire / C’est une erreur que fit ma mère “ a trop tôt tiré sa révérence (décédé à l’âge de 37 ans). Révélé en 1966 par Comme dirait Zazie (cette chanson brocarde l’époque dans la lignée des Temps difficiles de Léo Ferré, l’une des références de Jonas). C’est d’ailleurs dans ce registre caustique, impertinent et frondeur que Jehan Jonas donne la pleine mesure de son talent : en particulier dans Flic de Paris (“Tu m’diras que tu fais ton boulot / Que t’es pas pagné pour le cerveau / Heureusement qu’on t’paye pas pour ça / Parce que sinon tu boufferais pas “), Saint Antoine (où Jonas s’en prend aux idoles de la chanson), J’achète (“Le taxi de grand père / Quand il fut décoré / Dans une drôle de guerre / Où il a trop marné “). Dans un autre genre, un titre comme Le cou si fragile prouve, si besoin était, que la chanson en 1967 (date du second album du chanteur) n’hésitait pas à traiter de sujets aujourd’hui considérés comme “tabous” ou “incorrects” : “Elle avait un cou d’innocence / J’aurais pas dû serrer si fort / Maintenant l’aile de la mort fait comme un trou dans le silence “. Le talent poétique de Jonas est reconnu certes, mais la musique ? Le bât blesse plutôt du coté des orchestrations (et pourtant il s’agit de Michel Colombier !). Ces réserves ne valent pas pour Merci ma mère, où le minimalisme de l’arrangement musical va de soi dans une chanson qui n’est pas sans évoquer Jean Rictus.