LEFORESTIER (Maxime)

Un beau jour Maxime Leforestier débarqua sur les ondes avec San Francisco. Loin des chromos de l’imagerie hippie transmise par les groupes “power flower” du littoral californien, ce San Francisco là lorgnait plutôt du côté de Kerouac. Mais le jeune Maxime n’avait nullement connu le Frisco de Kérouac, Cassidy et du reste de la bande. Le sien s’inscrivait dans une autre dimension : il s’agissait d’un havre de paix situé quelque part au croisement des routes de l’amitié, de la musique et des chansons (“C’est une maison bleue / Adossée à la colline / On y vient à pied, on ne frappe pas / Ceux qui vivent là ont jeté la clef ). Cette belle entrée en matière introduisait un album dont les chansons se retrouvèrent bientôt sur de nombreuses lèvres : Mon frère, Éducation sentimentale, La rouille, Comme un arbre, Fontenay-aux-roses, Parachutiste. Un second 30 cm trace le même sillon : couleur poétique (celle des textes de Kernoa : Mauve, Là où), et politique (les couplets contestataires de Leforestier : Le steak, Dialogue) s’équilibrant. Le troisième album, certainement le plus abouti des trois, se signale par la sobriété de son accompagnement musical (une contrebasse et deux guitares). On entend d’ailleurs comme un hommage musical à Brassens dans L’irresponsable. Signalons également La vie d’un homme (chanson dédiée à Pierre Goldman) et Saltimbanque (où la relation voix / contrebasse accouche d’un petit chef d’oeuvre). Mais on retient surtout Les lettres : une correspondance retrouvée dans un grenier donne l’occasion à Maxime Leforestier d’écrire une belle chanson sur le temps qui passe, l’absence de l’être aimé et le quotidien des journées de guerre (celle de 14-18).

Après un quatrième album “de transition”, le suivant amorce une première évolution musicale (Sage se détache du lot). Il s’ensuit une période de “traversée du désert” : Leforestier sort plusieurs disques dans une relative indifférence. On a pu parfois abusivement qualifier cette période d’expérimentale. Mais il parait certain que l’on attendait pas Maxime Leforestier dans un registre qui l’éloignait du public (plutôt gauchiste) qui le suivait depuis les premiers albums. Le succès justifié que rencontre en 1988 le titre Né quelque part renverse la tendance. Cet album, ainsi que son suivant, s’inscrivent néanmoins plus qu’auparavant dans l’air du temps. Et l’on observe que Leforestier a en grande partie renouvelé son public. La bonne surprise à venir s’appelle “Passer ma route” : d’abord pour la chanson-titre, mais plus encore pour Raymonde (une chanson excellemment défendue par l’accordéon de Richard Galliano).