MONTÉHUS

Montéhus (appelé le “chansonnier humanitaire”) est l’auteur et l’interprète de quelques unes des chansons d’un répertoire que l’on appellera “révolutionnaire”, “anarchiste” ou “populiste” (dans l’ancienne signification de ce second terme). La plupart de ces titres ont été crées durant les dix années précédant le premier conflit mondial. Si la verve antimilitariste domine (Un vrai croyant, Le père la révolte, et surtout Gloire au 17e, une chanson dédiée aux soldats du régiment d’infanterie qui, le 18 juin 1907, refusèrent d’ouvrir le feu sur une manifestation de vignerons insurgés), Montéhus dénonce également l’exploitation capitaliste (On est en république), la corruption (Y’a des honnêtes gens dans l’gouvernement), les puissants (Ils ont les mains blanches), la prostitution (N’insultez pas les filles), l’alcoolisme (Morale à la débauche), la loi interdisant l’avortement (La grève des mères). Lénine eut l’occasion d’entendre Montéhus entre 1909 et 1912. Le second invitera le premier à la fin de quelques uns de ses concerts pour l’une de ces “prises de parole” habituelles qui transformaient le tour de chant de Montéhus en meeting.

En 1914 Montéhus retourne sa vareuse. Lettre d’un socialo ou la désolante Pan pan... l’Arbi apportent le témoignage du ralliement de Montéhus à l’Union sacrée et au bellicisme. Le “chansonnier humanitaire” y perdra une partie du public populaire qui le soutenait depuis ses débuts. Sa carrière subira ensuite une longue éclipse, malgré la reprise dans les années vingt des thématiques de l’avant guerre. Montéhus reviendra sur le devant de la scène lors du Front Populaire avec Vas y Léon ! La chanson la plus célèbre de Montéhus, cette Butte rouge dont on ne sait pas toujours qu’il en est l’auteur, date de 1924. Une célébrité pourtant entachée d’ambiguité lorsque l’on sait que cette butte, loin de symboliser la colline rougie du sang des communards, évoque plus prosaïquement la butte de Bapeaume (lieu de violents combats sur le front de la Somme en 1916).